Races Ferrandaise et Villard de Lans :
étude des facteurs influençant la dynamique démographique des races en conservationMémoire de fin d’études 23 novembre 2007
Lénaïg Menuet (stagiaire IE)

Depuis les années 60, il y a une prise de conscience des dangers de la disparition des espèces animales domestiques. Ainsi, en 2007, a démarré le programme européen EURECA "vers des races auto-maintenues durablement en Europe", dans lequel s’inscrit l’étude de deux races bovines locales françaises, la Ferrandaise et la Villard de Lans.


Les actions de conservation pour ces deux races ont été mises en place à la fin des années 70, avec des résultats aujourd’hui différents. Pourquoi ces races, qui ont une histoire similaire et qui ont reçu un appui technique équivalent, ont-elles évolué différemment ?

L’étude a été conduite en trois étapes, d’abord par une approche bibliographique, puis sous forme d’entretiens auprès des éleveurs et autres acteurs de la conservation, afin de déterminer les facteurs, favorables ou défavorables, au maintien et au développement des races étudiées.

Pour les deux races, il existe une diversité des élevages, notamment du point de vue du mode d’utilisation des animaux. Les facteurs positifs pour le développement des races sont l’insémination artificielle, de bonnes relations entre éleveurs et un territoire ouvert. Les pistes de travail identifiées concernent la réactualisation des références (performances, mensurations,…) pour améliorer la communication sur les races et trouver de nouveaux éleveurs ainsi que la mise en place de filières courtes qui permettraient de mieux valoriser la race (fromage, boucher, …).


Institut de l'Élevage / Laurent Avon
20/08/2007

PRESENTATION
La race Ferrandaise est une race bovine originaire du département du Puy de Dôme. Son berceau, dont le coeur est le triangle "Gelles, Rochefort, Laqueuille", est la région de la Chaîne des Puys au sud-ouest de la ville de Clermont-ferrand d'où elle tire son nom. Un deuxième centre d'élevage, tributaire du premier, se situe autour d'Ambert dans le Livradois. Son aire géographique s'étendait des Monts Dore aux Monts du Forez dans la Loire. Elle débordait également sur les départements de la Haute Loire et de la Corrèze.
Certains disent qu'elle serait parente de la race Salers et de ce fait appartiendrait à un groupe de races dites auvergnates, d'autres qu'elle serait plutôt d'origine jurassique. Elle semble participer de ces deux tendances. L'abbé de Pradt qui fut le premier à la décrire au tout début du XIX° siècle en fait la race de la Limagne et tente des croisements sans suite avec la race suisse Fribourgeoise. C'est vers 1860 que le vocable "ferrandaise", parmi beaucoup d'autres, a commencé à s'imposer.
La race a eu beaucoup de peine à être admise car ses robes "bigarrées", avec autant d'animaux pie-noir que pie- rouge, semblaient être un indice d'impureté et d'imperfection à une époque où l'uniformité du type était considérée comme l'idéal de la sélection. Ainsi elle a beaucoup souffert de la comparaison avec la Salers dont l'unité de la robe a très vite été acquise. C'est en 1899, au cours du congrès des Sociétés Agricoles du Puy de Dôme que la robe pie-rouge dite "barrée rouge" a été la seule admise pour la race.
En 1902 la race eut son Concours Spécial à Clermont-ferrand. Un Herd-Book fut crée en 1905 et en 1906 elle eut sa section spéciale au Concours Général Agricole de Paris. En 1945 on comptait 110 syndicats d'élevage. La race fut à son apogée entre les deux guerres. Elle comptait 80 000 vaches et faisait l'objet d'un commerce important selon un mouvement d'ouest en est, les animaux hors standard étant rejetés hors du berceau.
Après la guerre, bien qu'amoindrie, la race comptait encore plusieurs milliers de sujets. Le déclin s'accéléra au début des années soixante à cause des campagnes de prophylaxie et de l'abandon de la traction animale qui favorisèrent l'introduction d'autres races. Alors que l'insémination artificielle se développait les taureaux Ferrandais n'y furent pas admis. Le croisement industriel Charolais pris également beaucoup d'ampleur, handicapant encore davantage le renouvellement du cheptel.

ACTIONS DE CONSERVATION
En 1977, alerté par l'ITEB (aujourd'hui Institut de l'Elevage) qui commençait à se préoccuper de la conservation des races bovines, le président du Parc Naturel Régional des Volcans d'Auvergne, le docteur Garnier, vétérinaire, demanda à deux agents du Parc d'effectuer le recensement des animaux de la race. Moins de 300 vaches dont beaucoup très âgées furent retrouvées.
Aussitôt un programme de conservation fut lancé avec l'aide de l'ingénieur et du technicien de l'ITEB, décentralisés au CIA du Suquet (63). Le Parc contribua au lancement de l'association des éleveurs et entreprit de monter des dossiers de financement en collaboration avec la DDA du Puy-de-Dôme. En 1978, après avis de la CNAG (Commission Nationale d'Amélioration Génétique) un crédit du Ministère de l'Agriculture permis de passer à l'action. Depuis cette date le travail de conservation de la race repose sur le triptyque, Association, Institut de l'Elevage et Parc des Volcans. 1/ Une des premières mesures a consisté à faire collecter la semence des derniers taureaux pour permettre la reproduction en race pure des vaches isolées. Trois taureaux furent repérés en 1978 mais seul le dernier de la liste, JOLI- COEUR, put satisfaire aux exigences sanitaires. Il fut mis en service l'année suivante. Un deuxième taureau GERANIUM, apparenté au premier, put seulement être collecté en 1981, puis deux autres VULCAiN 2 et PIGEON en 1983, fils des taureaux laissés pour compte en 1978. Des inséminations réalisées sur de vieilles vaches de bonne qualité et bien typées ont permis ensuite de créer des fils ou petits fils des taureaux précédents, décalés génétiquement entre eux par leur mère ou grand-mère. Aujourd'hui les 29 taureaux disponibles à GENESIA pour l'insémination animale représentent une diversité génétique satisfaisante qui exclut les risques de consanguinité.
Ces opérations de collecte ont d'abord été financées par le Ministère de l'Agriculture puis principalement par le Conseil Général du Puy-de-Dôme.
2/ Dès 1981, un fichier des animaux, reconnu aujourd'hui comme livre généalogique de la race, est tenu par l'Institut de l'Elevage. Le principe admis est celui de l'exhaustivité. Tout éleveur, même s'il ne possède qu'une seule vache, compte, et tout animal est important. La liste des propriétaires et des animaux est mise à jour tous les ans et communiquée à l'ensemble des éleveurs qui ont ainsi la possibilité de se repérer dans la race. Chaque année les élevages sont visités ou à défaut, les éleveurs contactés.
Les débuts furent difficiles car beaucoup de vaches étaient très âgées et se reproduisaient mal. Ainsi l'effectif descendit à moins de 150 vaches. Beaucoup de mères à taureaux furent perdues car JOLI-COEUR a longtemps été seul opérationnel et l'on ne pouvait pas baser la fabrication de nouveaux taureaux seulement sur lui. GERANIUM l'a par la suite épaulé mais il représentait les mêmes origines, peu satisfaisantes d'un point de vue du type. Les veaux de ces taureaux étaient très beaux mais les vaches se sont avérées peu typées et médiocres laitières. Ce n'est qu'avec VULCAiN 2 et PIGEON, suivis de REVEIL et UNIQUE, que la race a pu desserrer l'étau génétique qui la menaçait. Puis les choses se sont améliorées progressivement et une dynamique démographique s'est crée.
En 2007 la race compte 1090 femelles dont 763 vaches chez 171 propriétaires.
3/ La Ferrandaise a été présentée à nouveau dans les grandes expositions nationales. Dès les années quatre-vingt elle participe au SAM (Salon d'Aménagement en Montagne) à Grenoble. En 1992, elle est admise, en présentation, au Concours Général Agricole à Paris où elle retourne tous les quatre ans. Enfin elle est présentée chaque année au Sommet de l'Elevage à Cournon depuis sa création en 1992.
A l'occasion de ces présentations un matériel de promotion et d'information a été élaboré par le Parc des Volcans et l'Association de Sauvegarde contribuant à donner une nouvelle image, plus moderne à la race.


PERSPECTIVES
La Ferrandaise est une race en plein renouveau qui a su maintenir ses aptitudes de base, traditionnelles.
La pression a été maintenue sur l'aptitude laitière et les 73 résultats de contrôle laitier en 2006 (lactations brutes) révèlent une production moyenne de 3 106 litres à 37,5 de TB et 31,7 de TP avec certaines lactations approchant les 6 000 kg de lait en condition de montagne. La Ferrandaise a été à l'origine de nombreux fromages comme la Fourme de Montbrison, la Fourme d'Ambert, le Bleu de Laqueuille, la Fourme de Rochefort et le St Nectaire (surtout fabriqué traditionnellement avec du lait de Salers), et se trait sans la présence du veau. Elle féconde très bien et a une grande longévité. Il n'est pas rare de voir des vaches produire et se reproduire encore passé l'âge de quinze ans.
La production de broutards dont la robe se confond avec celle des races laitières spécialisées n'est pas la spécialité de la race. C'est dans la production de veaux de lait blancs traditionnels ou de veaux rosés clairs qu'elle excelle. Les vaches sont suffisamment laitières pour, toutes seules, bien mener leurs veaux qui "tombent" toujours bien en couleur. La croissance est rapide, la conformation est excellente (parfois cularde), le rendement est élevé car l'ossature est fine. La viande est savoureuse. Un excellent restaurant parisien, "La Ferrandaise" dans le quartier St Michel a mis avec succès la Ferrandaise à sa carte.
C'est une race très rustique, qui ne craint pas le froid, qui n'a pas de problèmes de pieds ou de membres. C'est une marcheuse infatigable qui a beaucoup d'énergie ce qui la faisait apprécier pour le travail et le parcours en estive.
Enfin elle est visuellement attractive avec son allure élégante, son beau cornage, et sa robe "bigarrée" pie-rouge mais aussi parfois pie-noir par la réintroduction des robes noires qui s'étaient maintenues hors berceau et ses deux types de panachures, "l'irrégulière", dite barrée et la "flancs colorés" , aussi réintroduite, dite bregniée ou poudrée selon que la tache latérale est fractionnée ou non (à ne pas confondre avec la Salers "vergée", "verrée" ou "marquée" que l'on pouvait trouver à partir de La Tour d'Auvergne et Tauves et parfois source de confusions et de malentendus).
Sa polyvalence préservée et très aboutie dans ses
composantes en fait une race à part dans notre paysage
zootechnique qui attire de plus en plus d'adeptes pour
des projets diversifiés.


Association pour la sauvegarde de la race bovine
Ferrandaise

Parc Naturel Régional des Volcans d'Auvergne
Tél :0473656416-Fax: 0473656678
Mél : mteuma@oarcnaturel-volcansauvergne. com

Institut de l'Élevage -
Département Génétique

149 rue de Bercy, 75595 PARIS cedex 12
Tél :0140045206-Fax: 0140044950
Mél : laurent. avon@jnst- elevage.asso.fr


Institut de l'Élevage / Laurent Avon
20/08/2007


Race rustique - Jean-François Ondet : « La Ferrandaise, c'est un patrimoine »

Jean-François Ondet est éleveur de Ferrandaises au Mont Dore dans le Puy-de-Dôme. Il est présent au Sommet de l'élevage 2005 avec l’Association de sauvegarde de la race.

 


Jean-François Ondet, éleveur de Ferrandaises (© Web-agri)

 

Jean-François Ondet élève une trentaine de vaches ferrandaises. Il vient au Sommet de l’élevage pour faire la promotion de cette race locale qui a failli disparaître : « Nous sommes une association d’éleveurs. Nous sommes présents à Cournon depuis la première édition du Sommet. En venant ici, nous voulons montrer aux anciens, que la Ferrandaise existe encore. Nous essayons de faire connaître la race pour trouver de nouveaux éleveurs. »

La Ferrandaise est une race à très petit effectif : « Le cheptel ferrandais s’élève à 600 bêtes. » Depuis le début des années 90, le nombre de vaches augmente de 50 à 80 têtes par an. Pour l’éleveur, c’est avant tout la race du Puy-de-Dôme : « La Ferrandaise, c’est une race rustique, c’est un patrimoine. Dans les années 50, tous les fromages Aoc d’Auvergne étaient élaborés à partir de lait de Ferrandaises ou de Salers. »

 


Une ferrandaise à la robe dite "brégniée" (© Web-agri)

 

Jean-François Ondet apprécie sa rusticité : « C’est une race mixte qui produit juste avec de l’herbe et du foin. Elle n’a pas besoin d’être poussée avec des aliments. Elle passe facilement l’hiver à l’étable. C’est une vache qui a des aptitudes à rester longtemps enfermée car elle a de bons aplombs et de bons sabots. Sa corne est très dure. » C’est une vache qui est valorisée aussi bien pour son lait que pour sa viande : « La Ferrandaise produit en moyenne 4.000l. Son lait est riche en matières grasses et matières protéiques. Les taux sont assez proches, ce qui permet de faire des fromages de qualité. Au niveau viande, on arrive à sortir des carcasses de génisses de 400kg. »

Bénédicte Normand (2005)


"La ferrandaise (de Clermont-Ferrand) est une race bovine française à vocation mixte, lait et viande, originaire du Puy-de-Dôme", apprend-on sur le site qui lui est dédié.

La Ferrandaise est précise le site, «une race autochtone d'Auvergne, formée au XIXe siècle».

Utilisée autrefois comme animal de trait son effectif est aujourd'hiui très restreint, «environ 800 vaches reproductrices», peut-on lire sur le site où l'on trouve aussi la description suivante:

C' est une vache de taille moyenne : hauteur au garrot, 1,38 cm, poids moyen 650 kg. La robe est pie rouge (mais la robe pie noire est acceptée par le standard). Les cornes sont en forme de lyre basse. Les muqueuses sont claires.

 


La ferrandaise, race mixte (© http://ferrandaise.free.fr/)

 

  Elle est appréciée pour sa fertilité et sa longévité. Elle est assez rustique et bien adaptée à la vie en montagne (élevage de transhumance). Son lait sert notamment à la fabrication des fromages de saint-nectaire et de la fourme d'Ambert.

 

Plus d'infos sur cette race sur le site: http://ferrandaise.free.fr/

Béatrice Colleu, d'après ferrandaise.free.fr (2005)